Le 25 janvier 2025 - 9 min de lecture - Crédit Photo de Scott Graham
Lorsqu’un propriétaire ou locataire principal envisage de mettre à disposition tout ou partie de son local « commercial » (bureau, commerce, etc.), le contrat est en principe soumis au statut contraignant des baux commerciaux (facturation des charges au réel, durée minimale de 9 ans, droit au renouvellement du locataire en fin de bail, etc.).
Mais, si la mise à disposition de ces locaux est accompagnée de fourniture de services à l’occupant, il est possible d’envisager la conclusion d’un contrat de prestation de services (CPS), dont le régime est beaucoup plus souple et, s’agissant du locataire principal, peut éventuellement lui permettre de contourner l’interdiction de sous-location prévue au bail (1).
Pour bénéficier de ce régime, la mise à disposition des locaux ne doit être que l’accessoire de la fourniture de plusieurs services à l’occupant. Ce qui est contrôlé vigoureusement par les juges (2).
L’intérêt pour les parties de conclure un CPS est d’éviter l’application des règles strictes et contraignantes du statut des baux commerciaux.
Les parties peuvent ainsi librement :
Et aucun droit au renouvellement (ni au paiement d’indemnité d’éviction) n’existe au bénéfice de l’occupant en fin du contrat, contrairement aux baux commerciaux.
Concernant la durée du contrat, il est recommandé de prévoir une durée bien plus courte que celle du bail commercial (9 ans), afin de ne pas risquer une requalification en bail commercial (cf. 2 ci-dessous).
Le CPS peut être envisagé par le propriétaire de locaux commerciaux mais également par le locataire commercial lui-même, qui souhaite mettre à disposition tout ou partie des locaux qu’il occupe.
Dans ce dernier cas, le CPS peut permettre au locataire principal de contourner l’interdiction de sous-location très fréquemment prévue au bail.
Attention toutefois, le CPS ne doit pas être motivé exclusivement par cette volonté de contourner cette interdiction, au risque d’être requalifiée en sous-location déguisée (Cass. com. 8-2-1972 n° 70-13.978 : Bull. civ. V n° 53).
Aussi, outre l’interdiction de consentir une sous-location, le bail peut également prévoir une interdiction plus générale pour le locataire de « concéder la jouissance des lieux ».
Or, la jurisprudence retient à plusieurs reprises que cette interdiction de « concéder la jouissance » empêche le locataire de consentir une sous-location mais également un contrat de location-gérance (TJ Paris, 13 mai 2024, n° 23/10933 ; CA Paris, 12 nov. 2014, n° 12/22524).
Dès lors que la jouissance des locaux n’est qu’un accessoire tout aussi bien pour le contrat de location-gérance que pour le CPS, on peut raisonnablement penser que ces jurisprudences peuvent s’appliquer aussi au CPS.
Autrement dit, en présence d’une clause du bail interdisant de concéder la jouissance des lieux, la conclusion d’un CPS sans autorisation du bailleur risque d’être interdite.
Le CPS porte principalement sur la fourniture de services à l’occupant, la mise à disposition de locaux restant un accessoire du contrat.
Compte-tenu des avantages du régime (liberté contractuelle, absence d’engagement de renouveler, éventuel contournement de l’interdiction de sous-location prévue au bail), le CPS fait l’objet d’un contentieux abondant initié soit par l’occupant cherchant à bénéficier du statut protecteur des baux commerciaux, soit par le propriétaire désirant empêcher une sous-location déguisée consentie par son locataire principal dans ses locaux.
Car les juges ont naturellement la faculté de requalifier un CPS en sous-location déguisée soumise aux baux commerciaux, s’ils considèrent le contrat comme tel (Cass. com. 8-2-1972 n° 70-13.978)
Pour retenir la qualification de CPS, les juges vont se fonder sur un faisceau d'indices, dont notamment :
1. Principalement : l'existence d'autres prestations accompagnant ou conditionnant la mise à disposition des lieux. Telles que :
Ce critère est indispensable à la qualification de CPS.
2. Une jouissance des locaux limitée dans le temps :
3. Une jouissance partagée ou des locaux spécifiquement aménagés :
Ces critères proviennent notamment de jurisprudences rendues récemment (en 2024) par la Cour de cassation et la Cour d’Appel de Paris, venant apporter davantage de confort et de sécurité juridique aux parties s’engageant sur le CPS.
Même si la vigilance doit rester de mise compte-tenu du risque de requalification si les juges viennent à considérer que le CPS a été conclu dans l’intention principale d’échapper au statut des baux commerciaux.
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